Présentation

Nadine Larivière
Rédactrice en chef, Mosaïque

Ce numéro Mosaïque du printemps 2024 bourgeonne d’articles reflétant le dynamisme de la recherche en santé mentale dans la francophonie et nos défis communs. Le numéro débute par deux études qui se penchent sur les répercussions et les apprentissages à tirer dans le déploiement de services au cours de la pandémie de la COVID-19. Justine Fortin et ses collègues ont donné une voix à 18 femmes ayant le cancer du sein pour mieux connaître leurs recommandations concernant l’accès et la qualité des services psychosociaux afin de répondre à leurs besoins. L’équipe d’Alexis H. Truong quant à elle s’est penchée sur le burnout, le stress traumatique secondaire et la détresse psychologique vécus chez les personnes intervenantes et gestionnaires du milieu communautaire au Québec. Selon les auteurs, les pistes de solutions suggérées par les résultats pour prévenir une fragilisation de la santé psychologique devraient être davantage collectives.

Outre des crises sanitaires, d’autres phénomènes mondiaux en croissance sont les catastrophes naturelles, qui entraînent indéniablement des conséquences notables sur la santé mentale des individus et des collectivités. Afin de mieux les comprendre, Louis Jehel et Mathieu Giguère ont appliqué une méthode de psychophénotypage assistée par l’intelligence artificielle sur les données de 40 personnes sur une durée de 20 mois, pour extraire les aspects psychopathologiques et psychiatriques liés aux aléas naturels traumatisants (lahars) dans la commune du Prêcheur aux Antilles françaises. Il en ressort que la rumination et la négativation sont des aspects psychopathologiques importants, ainsi que l’évitement cognitif et émotionnel après la catastrophe.

Un modèle de soin important au Québec, le Programme québécois pour les troubles mentaux (PQPTM) cadre l’organisation des services en étapes. Quentin Bet et ses collègues examinent une de ces étapes, l’autosoins, auprès de travailleurs sociaux. Leurs résultats identifient différents facteurs facilitant ou entravant l’implantation de ce programme, touchant à la fois l’intervention, les professionnels, l’organisation, et les personnes avec des troubles mentaux. Pour soutenir l’implantation de services et d’interventions favorisant le rétablissement, il est essentiel de documenter l’expérience des personnes concernées. L’équipe de Laurence Roy a mené une étude explorant « les expériences en logement des personnes en début de parcours d’utilisation de services psychiatriques : spécificités et enjeux développementaux ». Leurs résultats soulignent l’importance d’agir dans une perspective de prévention de l’itinérance chez des jeunes en début de parcours dans les services en santé mentale, qui implique plusieurs acteurs clés.

Les trois derniers articles s’attardent aux médecins lors de leur résidence et en pratique. Pour leur part, Sara Echater et collègues soulèvent, par leur étude, l’importance de la sensibilisation aux addictions aux substances psychoactives chez les médecins résidents au Maroc, qui s’avèrent fréquentes et qui peuvent engendrer plusieurs impacts dans leur vie et sur leur santé. Non seulement un soutien à l’expérience étudiante est important, mais il convient également d’offrir des nouvelles possibilités pédagogiques dans la formation. Ainsi l’équipe de Kevin Zemmour a développé et effectué un essai d’un « nouvel outil pédagogique de simulation 3D d’hallucinations auditives, cocréé avec des entendeur(-se)s de voix : étude pilote auprès des résident(e)s en psychiatrie ». Le but de cette immersion est de mieux comprendre l’expérience des personnes qui ont des hallucinations auditives et ultimement, l’empathie dans la relation.

Vincent Laliberté, psychiatre, clôt le numéro de ce printemps par son témoignage de pratique en région et ses observations percutantes sur l’itinérance et la santé mentale hors des centres urbains. Un article de type perspective qui porte à la réflexion pour mieux accompagner ces personnes particulièrement vulnérables.

URI : https://id.erudit.org/iderudit/1112523ar
DOI : https://doi.org/10.7202/1112523ar

PRESENTATION

This Spring 2024 issue of Mosaïque is blooming with articles reflecting the dynamism of mental health research in the French-speaking world and our shared challenges. The issue opens with two studies looking at the impact and lessons to be learned in delivering services during the COVID-19 pandemic. Justine Fortin and her colleagues gave a voice to 18 women with breast cancer to learn more about their recommendations regarding access and quality of psychosocial services to meet their needs. Alexis H. Truong’s team examined burnout, secondary traumatic stress and psychological distress among community workers and managers in Quebec. According to the authors, the solutions suggested by the results to prevent the weakening of psychological health should be more collective.

In addition to sanitary crises, other growing global phenomena include natural disasters, which undeniably have a significant impact on the mental health of individuals and communities. To better understand them, Louis Jehel and Mathieu Giguère applied an artificial intelligence-assisted psychophenotyping method on data from 40 people over a 20-month period, to extract psychopathological and psychiatric aspects linked to traumatic natural hazards (lahars) in the commune of Le Prêcheur in the French West Indies. The results show that rumination and negativisation are important psychopathological aspects, as well as cognitive and emotional avoidance after the disaster.

An important model of care in Quebec, the Programme québécois pour les troubles mentaux (PQPTM) frames the organization of services in steps. Quentin Bet and his colleagues examined one of these steps, self-care, with social workers. Their results identify various factors facilitating or hindering the implementation of this program, related to the intervention, the practitioners, the organization and the service users. To support the implementation of recovery-oriented services and interventions, it is essential to document the experience of those concerned. Laurence Roy’s team conducted a study exploring “les expériences en logement des personnes en début de parcours d’utilisation de services psychiatriques: spécificités et enjeux développementaux/the housing experiences of people at the beginning of their psychiatric services: specificities and developmental issues.” Their findings underline the importance of taking action to prevent homelessness among young people early on when receiving mental health services. This in turn involves several key players.

The last three articles focus on physicians during residency and in practice. In their paper, Sara Echater and colleagues raise, through their study, the importance of advancing awareness of addictions to psychoactive substances among resident doctors in Morocco, which are proving to be frequent and can have a number of impacts on their lives and health. Not only is it important to support the student experience, but also to offer new pedagogical possibilities in training. Kevin Zemmour’s team has developed and tested a “nouvel outil pédagogique de simulation 3D d’hallucinations auditives, cocréé avec des entendeur(-se)s de voix: étude pilote auprès des résident(e)s en psychiatrie/new pedagogical tool for 3D simulation of auditory hallucinations, co-created with people who hear voices: pilot study with psychiatric residents.” The aim of this immersion is to better understand the experience of people with auditory hallucinations and, ultimately, empathy in relationships.

Psychiatrist Vincent Laliberté closes this spring’s issue with an account of his practice in regions and his hard-hitting observations on homelessness and mental health outside urban centers. A thought-provoking perspective on how to better support these particularly vulnerable people.

URI : https://id.erudit.org/iderudit/1112524ar
DOI : https://doi.org/10.7202/1112524ar

Auteur : Nadine Larivière
Titre : Présentation
Revue : Santé mentale au Québec, Volume 49, numéro 1, printemps 2024 p. 23-26